Christophe Bougelet — Terwagne est responsable de l’administration et
de l’informatique au SPAF, le Service Provincial d’Aide Familiale.
Spécialisée dans l’aide aux personnes, l’entreprise est active dans les 38 communes de la Province de Namur et compte environ 460 travailleurs, dont 260 aides familiales. Les domaines d’activité du SPAF sont l’accompagnement à la personne ; le soutien dans les tâches ménagères et les petits travaux quotidiens, mais également l’accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Le SPAF a entamé sa transformation numérique en 2004.
Expliquez-nous comment tout a commencé.
C.B-T. : En effet, en 2004 nous avons mis en place un outil informatique de gestion, depuis la création des horaires de nos travailleurs, jusqu’au paiement des salaires et tout ce qu’il peut y avoir entre les deux. À l’époque, nous avons entamé cette démarche avec deux autres ASBL membres de la FEDOM (Fédération wallonne des services d’aide à domicile). La situation de départ était celle-ci : tous les horaires se faisaient sur papier pour l’ensemble de nos travailleurs et les modifications et suivis des prestations nécessitaient une intervention humaine. Avec le volume de travailleurs et de bénéficiaires gérés par le SPAF, cette gestion était à la fois chronophage et susceptible d’erreurs.
L’outil installé a permis une plus grande flexibilité et de la justesse dans la création des horaires, avec la possibilité de croiser des informations, d’avoir par exemple une aide à la planification et à la décision. De plus, l’outil nous permet d’être plus proches et plus rapides dans les réponses à pouvoir donner aux travailleurs, ce qui facilite leur travail et améliore leur bien-être. L’outil facilite également la facturation, la vérification des prestations, le paiement des salaires et l’envoi d’information vers le secrétariat social. Au-delà de la facilité administrative apportée, l’outil permet de décharger nos équipes de travail sans valeur ajoutée.

En 2017, le SPAF a poursuivi sa digitalisation…
C.B-T. : Tout à fait, nous avons décidé de mettre en place un smartphone professionnel pour nos travailleurs du terrain pour remplacer leur document de prestation. Ici aussi, nous avons pris contact avec des collègues qui avaient déjà de l’expérience dans le domaine. Nous avons réalisé que ce qui était souvent utilisé, c’était une application configurée pour des services de livraison, via la géolocalisation. Cette option n’offrait pas, pour nous, une valeur ajoutée par rapport à l’humain et à notre secteur d’économie sociale. Après un travail de recherche en équipe, nous avons trouvé une application qui permettait l’horodatage, dont nous avions besoin, mais qui permettait surtout pour nos travailleurs d’avoir accès au dossier du bénéficiaire, uniquement lorsqu’il est à son domicile. Ce fonctionnement permet de la justesse par rapport à la prestation effectuée, une grande facilité dans l’envoi des modifications éventuelles et une meilleure connaissance des besoins des bénéficiaires.
Dans notre déclaration de mission, une grande place est dédiée à la qualité et au respect profond que nous avons pour tous nos travailleurs. Le temps qui était avant consacré à l’administratif et à des vérifications est maintenant libéré et consacré à la gestion de la carrière de nos travailleurs. Avec une pyramide des âges un peu vieillissante, nous avons aujourd’hui du temps pour accompagner sereinement nos travailleurs, comme par exemple les informer sur leurs possibilités d’alléger leur fin de carrière. Nous utilisons aujourd’hui le temps de façon efficace en le consacrant à nos travailleurs.
Quelles ont été les craintes face à cette digitalisation ?
C.B-T. : Le frein principal était l’utilisation technique des outils. Passer d’une situation tangible, le papier, vers une information digitalisée et l’éventualité d’un problème technique, inquiétait les utilisateurs. Concernant le smartphone, je faisais allusion précédemment à notre pyramide des âges, nous avions effectivement des travailleurs qui n’en avaient jamais utilisé.
Nous avions anticipé cette situation. Déjà un an et demi avant la mise en place de l’outil smartphone, nous avions organisé une formation pour notre personnel de terrain. Il s’agissait d’une initiation et d’une familiarisation avec l’outil informatique. Ensuite, nous avons mis en place des groupes pilotes avec un panel de travailleurs de tous types de profils et avec des maturités digitales différentes. Cela nous a permis de mettre de côté des soucis techniques, mais surtout de nous préparer à comment répondre aux questions. Suite à ça, nous avons par exemple créé un mode d’emploi, en version imprimée, pour chaque travailleur, ainsi qu’un helpdesk.
On n’imagine pas revenir en arrière

Y a-t-il eu de mauvaises surprises dans ce parcours ?
C.B-T. : Oui, au lancement de notre outil de gestion, malgré les tests, nous avons dû faire face à un problème technique conséquent. Notre situation géographique faisait qu’on avait une mauvaise connexion internet, ce qui n’a pas aidé. La contrepartie, c’est que cette situation nous a démontré une super solidarité entre les services pour régler ce problème et ça nous a poussés à trouver des solutions afin d’améliorer la couverture internet.
Votre plus grande satisfaction ?
C.B-T. : Lors du projet « smartphone », une travailleuse en fin de carrière était vraiment angoissée car elle n’en avait jamais utilisé. Elle n’en dormait pas et était vraiment désemparée. Peu de temps après la mise en place effective du projet, elle est venue nous montrer son propre smartphone et nous dire fièrement qu’elle faisait désormais des appels Skype avec ses petits-enfants. Ce projet a permis aussi de faire évoluer nos travailleurs au niveau des technologies et d’en profiter à titre personnel.
Avez-vous d’autres projets pour la suite ?
C.B-T. : Oui, nous parlions plus haut du dossier social du bénéficiaire. Ce dossier est créé par le travailleur social qui se rend au domicile. Notre outil de gestion permet déjà l’encodage de ce dossier, au format souhaité par l’AViQ, mails il est toujours fait en version papier. Nous souhaitons donc simplifier l’encodage pour que tout puisse être fait au domicile, avec le bénéficiaire.

Si vous aviez un conseil à donner à celles
et ceux qui hésitent à se lancer, quel serait-il ?
C.B-T. : Ce serait d’assurer une bonne préparation pour obtenir l’adhésion du personnel. Pas seulement dans l’objectif d’une utilisation de l’outil, mais bien par leur participation au processus. La préparation technique est évidemment essentielle, mais je pense qu’au-delà de ça, la bonne communication sur le projet, suffisamment à l’avance, permet à l’idée de faire son chemin dans l’esprit de chacun et de bien la comprendre pour bien l’appréhender.